Les terres qui bordent l’Eau Bourde sur la commune de Bègles furent exploitées pour les cultures et l’élevage. Dès le XIIe siècle les moines qui se sont établis sur les hauteurs du site actuel de Mussonville y construisent un moulin à eau. Ce moulin sera en activité jusqu’au XIXe siècle.
Aperçu général
Aujourd’hui détruit, le moulin de Peyrelongue était l’un des nombreux moulins construit le long de l’Eau Bourde, petit ruisseau qui se jette dans la Garonne par plusieurs ramifications (Esteys). Le moulin aujourd’hui détruit était situé au niveau du 158 rue Alexis Labro.
Extrait du Cadastre de 1812
Ce moulin fut comme la majorité de ceux construits sur l’Eau de Peyrelongue (Eau Bourde) et ses esteys, au centre d’âpres négociations entre les seigneurs locaux et les moines de l’Abbaye Sainte-Croix. En activité jusqu’au XIXe siècle, il fut ensuite transformé en tannerie puis remplacé par une chocolaterie, encore en activité aujourd’hui (Usine Cémoi).
Histoire
En 1152, l’abbé Arnaud Gombaud achète à Bernard d’Escoussans les droits sur l’aqua venant de Peyrelongue pour 200 sous bordelais.
Beaudouin III et ses frères cèdent contre un cheval à l’abbé et aux moines de Sainte-Croix “l’eau de Peyrelongue avec tous les fiefs situés entre Peyrelongue et Centujan, jusqu’à la confluence de cette eau avec celle des arcs » pour permettre la construction de moulins. Les moines n’auront de cesse de ce faire confirmer cette donation face à d’autres ayant droit ne demandant qu’à les évincer.
En 1181, Richard, comte de Poitiers et futur roi d’Angleterre, octroie aux Bénédictins de Sainte-Croix les droits du l’Eau de Peyrelongue. Ce droit sera à l’origine de plusieurs procès notamment contre les exploitants des moulins en amont qui réduisaient le rendement des moulins construits en batterie au niveau de l’Abbaye Sainte-Croix (enquête de 1356) dont le moulin de Peyrelongue faisait partie.
Face aux Seigneurs de Centujan et grâce à de puissants appuis (4), les moines de l’Abbaye de Sainte-Croix parviennent progressivement à leur soustraire tous les droits sur l’Eau Bourde et sur cinq des moulins qui sont construit sur ses rives (Peyrelongue, Centujan, Estrabon, Prat, Estey-cocut, Estey-majou).
Ruiné probablement au XIVe et le XVe siècle, le moulin est reconstruit au XVe siècle
Le 11 janvier 1574 (1), Michel de Montaigne, maire de Bordeaux, reçoit une dotation correspondant à 50% des droits sur le Moulin de Peyrelongue. Dans on acte du 17 mai 1746, le moulin est décrit de façon assez précise. Il fonctionne en franc-alleu et comprend alors plusieurs dépendances : grange, jardin, praires et aubarèdes (Plantations de saules ou de peupliers blancs). Au XVIIIe siècle, le moulin devait être un domaine d’importance en regard de sa position sur la carte de Cassini.
Saisi pendant la révolution il est vendu comme bien national à la famille Dubedat.
Le cadastre de 1812, dont la version restaurée est accessible en ligne mentionne clairement le moulin, tout comme une notice sur le Musée d’Aquitaine de 1824 (2). On peut ainsi apprécier la taille du domaine et de ses dépendances. En 1843, le Moulin est équipé de deux meules à grain.
En 1900, M. Faller achête la moulin et y installe une tannerie, la Tannerie bordelaise. Le moulin est entouré d’ateliers de fabrication qui travaillent des peaux venant d’Amérique du Sud. On produit des cuirs à semelles et pour fabriquer des courroies. En 1912, les esteys de Francs et de Sainte-Croix sont chargées de boues graisseuses qui empêchent les blanchisseuses de travailler. En 1913, les élus décident de poursuivre en justice la Tannerie mais aucune sanction de sera prise, son directeur étant le Maire de la Ville de Bègles.
En 1929, une fusion a lieu avec les tanneries de Gradignan et de Villenave d’Ornon qui forment « les Tanneries bordelaises et de la Gironde réunies » dont le siège est installé à Bègles. L’exploitation de la tannerie s’effectue jusqu’à sa fermeture en 1960. La chocolaterie Coop s’y installe et deviendra tour à tour société du Cheval Blanc, puis chocolaterie d’Aquitaine. Elle fait partie depuis les années 90 du groupe Cemoi. L’établissement est spécialisé dans la fabrication de tablettes de chocolat et de chocolat liquide pour l’industrie et constitue l’un des quatre sites de production de la marque en France.
Depuis un arrêté des services de l’état du 26 juin 2009, plusieurs zones de Bègles a fort intérêt archéologique font l’objet d’une protection. Le site du Moulin de Peyrelongue, aujourd’hui détruit, en fait partie.
Bibliographie
(1) Michel de Montaigne Son Origine, Sa Famille, Par Théophile Malvezin (p 83)
(2) Le Musée d’Aquitaine, recueil uniquement consacré aux sciences tome 3, Pierre Lacour, François Vatar Jouannet, J. B. de Saincric – 1824
(3) Cadastre de 1812, Mairie de Bègles
(4) Revue Historique de Bordeaux et du département de la Gironde, L’eau en Bordelais de l’Antiquité à nos jours, 2006
Site web Région Aquitaine : http://visites.aquitaine.fr/chocolaterie-d-aquitaine